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Indemnisation des victimes d’infractions : quelle étendue de l’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil ?

Pénal - Procédure pénale
11/03/2020
La Cour de cassation rappelle que l’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil ne s’étend qu’à ce qui a été décidé par le juge répressif en ce qui concerne l’existence du fait qui forme la base commune des actions civile et pénale, à sa qualification, à l’innocence ou culpabilité de celui à qui le fait est imputé. Alors, quid de l’étendue de l’autorité concernant la durée de l'incapacité totale de travail retenue ?
Un homme est agressé par un inconnu à son domicile. L’agresseur a été condamné pour des faits de violences avec arme ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à huit jours. Mais après avoir repris le travail, la victime a de nouveau été arrêté en raison d’un syndrome post-traumatique sévère. La victime s’est constituée partie civile. L’affaire a alors été renvoyée à une audience sur intérêts civils.
 
Le tribunal correctionnel, statuant sur la seule action civile, a condamné le prévenu à lui verser une certaine somme en réparation de son préjudice corporel. La partie civile saisit une commission d’indemnisation des victimes d’infractions aux fins de réparation de son préjudice.
 
La cour d’appel déclare irrecevable la demande d’indemnisation en rappelant que :
  • selon l’article 706-3 du Code de procédure pénale, « toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non, qui présentent le caractère matériel d’une infraction, peut obtenir la réparation intégrale des dommages résultant des atteintes à la personne, lorsque, notamment, ces faits ont entraîné une incapacité totale de travail personnel égale ou supérieure à un mois » ;
  • et les décisions pénales ont au civil l’autorité absolue de la chose jugée concernant la qualification du fait incriminé.
 
Ainsi, selon les juges du second degré, les faits de violences avec arme suivies d’une ITT inférieure à huit jours, en l’occurrence cinq jours, ne permettent pas l’application de l’article 706-3.
 
Un pourvoi est formé par la partie civile. Cette dernière soutient que « l’autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements nouveaux sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice ». À savoir, l’incapacité totale professionnelle due à un syndrome post-traumatique sévère.
 
La Haute juridiction, au visa des articles 1355 du Code civil, 4 et 706-3 du Code de procédure pénale, censure l’arrêt d’appel. Elle énonce qu’il « résulte des deux premiers de ces textes que l’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil ne s’étend qu’à ce qui a été nécessairement décidé par le juge répressif quant à l’existence du fait qui forme la base commune de l’action civile et de l’action pénale, à sa qualification et à l’innocence ou la culpabilité de celui à qui le fait est imputé ».
 
Ainsi, l’autorité de chose jugée attachée au jugement reconnaissant coupable le prévenu, ne faisait pas obstacle à ce qu’il fût jugé, que les faits dénoncés avaient entraîné, pour la victime, une incapacité totale de travail personnel supérieure à celle retenue par le juge répressif pour l’application du texte pénal d’incrimination. La cour d’appel aurait alors dû rechercher si l’incapacité totale de travail personnel était égale ou supérieure à un mois.
Source : Actualités du droit