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FGTI et indemnité provisionnelle complémentaire : attention à bien caractériser l’infraction terroriste

Pénal - Informations professionnelles
Affaires - Assurance
05/06/2020
La Cour de cassation a tranché dans un important arrêt rendu le 20 mai 2020 : il faut caractériser la nature et les éléments matériels de l’infraction terroriste pour avoir droit à une indemnisation provisionnelle complémentaire sollicitée du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions. 
À la suite de l’attentat terroriste commis en 2015 à Paris, une femme est inscrite sur la liste unique des victimes d’actes de terrorisme établie par le procureur de la République. Après avoir reçu des sommes provisionnelles du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI), elle l’assigne aux fins d’expertise et en paiement d’une provision supplémentaire à valoir sur l’indemnisation de ses préjudices psychologique et professionnel.
 
L’arrêt, statuant en matière de référé, rendu sur renvoi après cassation (Cass. 2e civ., 8 févr. 2018, n° 17-10.456, v. Victime de terrorisme : le FGTI n’est pas tenu par la liste dressée par le parquet !, Actualités du droit, 28 févr. 2020) affirme que l’attentat constitue un acte de terrorisme au regard des articles L. 126-1 du Code des assurances et 421-1 du Code pénal et donc, il incombe à l’intéressée de « faire la preuve qu’elle est victime de cet attentat ». La cour constate que :
- elle a démontré s’être trouvée dans la zone de danger au moment de l’attentat ;
- cet acte lui a causé, en lien direct, certain et exclusif, un traumatisme psychologique « d’une exceptionnelle intensité », constaté par expert judiciaire.
 
« La décision en déduit que la demanderesse a été, avec l’évidence requise en référé, victime de l’attentat, sans qu’il soit besoin que la juridiction précise la nature et les éléments matériels de l’infraction qu’elle retient comme ayant été commise au préjudice de cette victime, contrairement à ce que le FGTI demande » concluent les juges du second degré.
 
Le FGTI forme un pourvoi en cassation. Il reproche à l’arrêt de l’avoir condamné à payer à la victime une indemnité provisionnelle complémentaire sans que la victime ait « à préciser la nature et les éléments matériels de l’infraction terroriste qu’elle retenait comme ayant été commise à son encontre, quand il lui appartenait au contraire, pour caractériser l’existence d’une obligation non sérieusement contestable justifiant l’allocation d’une provision, de motiver tout spécialement sa décision de ce chef ».
 
Rappelons que dans l’arrêt rendu le 8 février 2018, la Cour de cassation avait reconnu au FGTI la possibilité de contester la qualité de victime d’une personne inscrite sur la liste unique des victimes d’acte de terrorisme, même après le versement de provisions (Cass. 2e civ., 8 févr. 2018, n° 17-10.456).
 
Alors, dans sa décision du 20 mai 2020, la Cour de cassation rappelle d’abord que les articles L. 126-1 et L. 422-1 du Code des assurances disposent que la réparation intégrale des dommages subis par les victimes d’infractions constitutives d’actes de terrorisme, prévus par l’article 421-1 du Code pénal, « est assurée par l’intermédiaire du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme ».
 
Et précise ensuite la nécessité pour la cour d’appel de caractériser une infraction constitutive d’un acte de terrorisme « ouvrant droit de manière non sérieusement contestable à l’indemnisation sollicitée du FGTI ».
 
À noter que dans un arrêt du 17 octobre 1995 (Cass. 1e civ., 17 oct. 1995, n° 93-14.837), la Cour de cassation a défini l’acte de terrorisme comme une infraction en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur.
 
Condition non remplie en l’espèce, dès lors que la caractérisation de l’infraction constitutive d’un acte terroriste n’est pas rapportée : la Cour casse et annule donc l’arrêt mais seulement sur l’indemnité provisionnelle complémentaire.
 
À notre connaissance, c’est le premier arrêt rendu en la matière qui distingue les faits de terrorisme et l’infraction constitutive d’un acte de terrorisme, qui suppose la réunion d’éléments constitutifs, nécessaire pour déclencher une demande d’indemnisation provisionnelle complémentaire.
 
Source : Actualités du droit