Connaître les missions dans le domaine du dommage corporel et les intervenants dans l'expertise médicale pour valoriser l'indemnisation de son préjudice corporel

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« Toute d'abord, l'expertise en dommage corporel ne se limite pas à une évaluation médicale de la victime.

Elle comporte également un volet non médical puisque l’atteinte à l’intégrité physique et psychique d’une personne a des implications sur son mode de vie.

Dès lors, l’évaluation du dommage corporel peut, pour être complète, exiger la réalisation de missions différentes.

Bien que variables dans leur nature, ces missions, ont, cependant, toujours la même finalité : apporter un éclairage au juge ou au régleur sur le dommage corporel subi ainsi que sur ses conséquences afin de lui permettre d’opérer une évaluation juridique des préjudices dans le respect du principe de réparation intégrale.

Ensuite, il existe dans la pratique de nombreuses missions-types qui sont des modèles établis afin de faciliter la rédaction des missions d’expertise par les juges ou les régleurs.

Elles n’ont aucun effet contraignant ou obligatoire, ces derniers, étant libre de ne pas y recourir.

En revanche, s’ils optent pour une mission-type, ils doivent nécessairement l’adapter au cas d’espèces.

Ces missions-types sont élaborées par différentes structures : les juridictions, les Fédérations de sociétés d’assurances, l’AREDOC, la CNAMed, l’ANADAVI, etc.

Au cours d’une expertise médicale, plusieurs professionnels peuvent être amenés à intervenir.

Il importe donc de bien distinguer leur rôle dans la procédure afin de ne pas les confondre.

En premier lieu, dans le cadre juridictionnel, toute évaluation du dommage corporel exige la désignation d’au moins un médecin en tant qu’expert, car « celui-ci est le premier récepteur des événements affectant le corps humain ».

Il est chargé de réaliser une mesure d’investigation avec, en principe, indépendance et impartialité afin d’éclairer le juge.

Selon les espèces et la complexité du dossier, peuvent également être désignés un ou plusieurs coexperts de spécialités différentes.

En outre, il est également possible de ne désigner qu’un seul expert-médecin qui décidera, pour mener à bien sa mission, de s’adjoindre un sapiteur, lequel doit nécessairement être d’une spécialité différente.

Au cours de cette mesure d’instruction, chacune des parties est en droit d’être assistée d’une médecin-conseil, lequel est notamment chargé de rédiger, préalablement à la réunion d’expertise, une note synthétique aux termes de laquelle sont soulevées les questions portant débat et soumettant éventuellement à l’expert désigné par le juge une première évaluation des préjudices.

Ces médecins-conseils peuvent également accompagner les parties aux réunions d’expertise et rédiger, le cas échéant, les dires que l’expert judiciaire sera tenu de prendre en compte lors de la rédaction de son rapport définitif.

En second lieu, dans le cadre amiable, il convient de distinguer plusieurs situations.

Lorsque l’évaluation intervient au cours de la procédure amiable d’indemnisation des accidents médicaux, laquelle est réglementée par les dispositions du Code de la santé publique, la CCI est tenue, avant d’émettre son avis, de désigner un collège d’experts.

A moins qu’elle n’estime suffisant de ne désigner qu’un seul expert, lequel doit, en principe, être inscrit sur la liste ad hoc dressée par la Commission nationale des accidents médicaux (CNAMed).

Comme lors d’une procédure juridictionnelle, les parties peuvent ici aussi être assistées par un médecin-conseil.

En revanche, lorsque la procédure d’indemnisation est diligentée dans un cadre amiable privé, le plus souvent l’évaluation est réalisée, unilatéralement ou contradictoirement, par le médecin-conseil du débiteur de l’indemnisation.

Lorsque l’examen médical amiable est contradictoire, il est réalisé en commun avec le médecin-conseil de la victime.

Enfin, il convient d’indiquer que, quel que soit le cadre, amiable ou judiciaire, les médecins traitants peuvent être sollicités afin de transmettre des pièces ou de préciser des éléments du dossier.

Ainsi, afin d’assurer une véritable loyauté des opérations d’expertise, il est important que chaque médecin intervenant puisse être parfaitement clair sur son rôle dans la procédure en cours.

Il n’est en effet pas rare qu’un même médecin endosser tour à tour, selon les dossiers, le rôle de médecin traitant, de conseil d‘une partie ou d’expert.

Il est fréquent aussi, dans le cadre des garanties défenses recours et des conventions entre assureurs, que les mêmes médecins interviennent à quelques jours d’intervalle dans des positions opposée, assistant un assureur puis un blessé indemnisé par ce même assureur.

L’idéal serait que chacun puisse rester à une place définie.

Toutefois, la démographie médicale est telle qu’il s’agit d’une véritable difficulté dans certaines régions ou dans certaines spécialités.

Au moins serait-il souhaitable, ce qui n’est pas encore le cas en pratique, que les médecins intervenant régulièrement dans une autre fonction que celle de l’expertise en cours puissent l’indiquer au conseil des opérations d’expertise, afin que l’ensemble des participants en soit informé.

A cet égard, il ressort des recommandations de bonnes pratiques juridictionnelles adoptées depuis 2007 qu’« il est de bonne pratique de faire souscrire à l’expert, dans tous les cas, une déclaration d’indépendance, sous la forme d’une attestation prérédigée qui lui sera envoyée par le greffe avec l’avis de désignation.

L’expert indiquera, ou bien qu’il renonce à la mission qui lui est proposée, ou bien qu’il l’accepte.

EN cas d’acceptation, l’expert déclarera, soit purement et simplement qu’il est indépendant, soit qu’il est indépendant mais que dans un souci de transparence, il souhaite porter à la connaissance du juge et des parties des éléments d’information qu’il estime ne pas remettre en cause son indépendance ».

Plus récemment encore, la Commission de réflexion sur l’expertise judiciaire, mise en place en 2010 par le garde des Sceaux, a proposé dans son rapport rendu en 2011 un modèle de « déclaration d’acceptation et déclaration d’impartialité et d’indépendance ». » (*)

En toute hypothèse, il convient d’être assisté d’un avocat habitué à ce type de dossier pour obtenir une juste indemnisation de l’ensemble des postes de préjudice.




* Max LE ROY, Jacques-Denis LE ROY, Frédéric BIBAL, L’évaluation du préjudice corporel, 21e édition LexisNexis